
UN MOUVEMENT POPULAIRE HISTORIQUE
En Février 2008 au Cameroun, un mouvement historique de contestation populaire gagnait une dizaine de villes. Président de la République depuis 1982, Paul Biya venait d’annoncer qu’il souhaitait réviser l'article 6 alinéa 2 de la Constitution afin de supprimer la limitation des mandats présidentiels à deux, pour pouvoir présenter sa candidature à un troisième mandat (après deux septennat et douze années de présidence sans élection). Parties de Douala, sous l'impulsion notamment du militant historique d'opposition Mboua Massock puis d'une grève des taxis, les manifestations de protestation contre ce projet ont rapidement gagné la capitale et bientôt d'autres villes. Les revendications des manifestantEs portaient sur la modification de la Constitution, la hausse des prix, le manque d'emplois. Pendant un peu plus d'une semaine de nombreuxSES camerounaisEs ont marché dans les rues et exigé un changement de politique et de dirigeant.
Le continent africain a connu à cette période (2007-2008) différents mouvement de contestation populaire, répondant entre autre à l'augmentation du coût des denrées de première nécessité, la violence économique que subit le continent, l'échec (l'absence de volonté?) des gouvernements nationaux à inverser ces dynamiques et aux aspirations populaires à des régimes plus justes.
Alors que les populations se mobilisaient autour d'enjeux résolument politiques et exprimaient leurs propres analyses des situations vécues, en Occident ces mouvements - tout comme les révoltes de 2008 au Cameroun - ont été improprement qualifiés d' « émeutes de la faim » ; des jugements assimilant les africain-e-s à des masses dénuées de conscience, mues uniquement par les nécessités du corps et incapable d'organisation politique.
Au Cameroun le gouvernement a choisi la voix de la répression pour répondre à la mobilisation générale : l'armée (le BIR, bataillon d'intervention rapide, entre autres forces spéciales) a été envoyée face aux manifestantEs, et la justice a arrêté et enfermé en masse, frappant également quelques figures populaires (Paul Eric Kingué, Lapiro de Mbanga...). Il y a eu environ de nombreuses arrestations, dont une bonne part ont conduit à des peines d'emprisonnement ; de nombreuxSES manifestantEs ont été frappéE-s, blesséEs, voire torturéEs, et l'Observatoire des Droits de l'Homme au Cameroun a recensé 139 personnes morts, bilan a minima. Les violations des droits humains par l’État sont ici également nombreuses.
NOTRE DÉMARCHE
Le collectif Cases Rebelles propose ici un espace dédié à des témoignages sur ces journées qui ont marqué l'histoire récente du Cameroun ; des récits recueillis sous forme d'interviews, de photos, et de textes. Cette compilation d'histoire orale est en cours, les éléments apportés seront postés au fur et à mesure de élaboration ou réception.
Le collectif remercie toutes les personnes qui ont participé à et facilité ces entretiens, partagé des photos et accepté leur publication. Nos pensées vont également aux victimes de Février 2008 et à leurs familles. Enfin nous exprimons notre solidarité avec les personnes qui se battent pour obtenir la vérité et la justice pour les injustices et violences perpétrées directement et en lien avec les révoltes de Février 2008.
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PROJET D'HISTOIRE ORALE
Les entretiens (en cours)
YVES MINTOOGUE
Emission n°55 : "Un ruisseau à multiples sources ne tarit jamais."
Pour ce 1er entretien d'une série consacrées aux révoltes de Février 2008 au Cameroun, nous accueillons
Yves MINTOOGUE, historien et ancien membre d'un syndicat étudiant. Il nous parle d’abord du contexte ayant précédé les manifestations, partage ensuite avec nous ses souvenirs des évènements à Yaoundé où il vivait alors, et revient pour finir sur le contexte camerounais de la violence d’État.
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HERMANN KENFACK
Représentant au Maroc du réseau Mouvement de Février 2008, Hermann KENFACK apporte son témoignage sur les manifestations de Février 2008 au Cameroun et leur répression, nous parle de son organisation. Pour finir il revient sur la marche de soutien à l’armée dans la guerre menée contre Boko Haram, marche que le pouvoir avait choisi d'organiser le même jour que les commémorations pour les victimes de 2008.
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THIERRY NJIFEN
Thierry Njifen est un ancien membre de l’association Cameroun O’Bosso, et aujourd'hui membre du Cameroon People's Party. Il revient sur le contexte de la mobilisation au Cameroun en 2008 et le caractère éminemment politique de ces révoltes qui avait été appelées "les émeutes de la faim". Il nous parle également du "Front du Non" constitué par l’opposition en 2008, du déroulement des manifestations à Douala, et de la répression et des actes meurtriers dont il a été témoin.
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MBOUA MASSOCK
Pour ce 4e volet, nous sommes honoréEs de partager avec vous le témoignage d’une figure politique, d’un militant historique : Mboua Massock. Nationaliste, panafricaniste, frondeur populaire redouté par le pouvoir, leader du mouvement NODYNA en 2008, celui qui se nomme lui-même « Le Combattant » ou « leader panafricain agissant » est aussi le père des « Villes Mortes » de 1991.
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JOSEPH DÉSIRÉ SOM 1
Lorsque nous avons publié le témoignage de Thierry Njifen, Joseph Désiré Som 1 nous avait contacté et envoyé des photos de marches et d’assemblées auxquelles il avait lui-même participé début 2008. Ces photos lui servent ici de fil conducteur pour nous raconter son vécu des évènements de 2008 dans le n°5 de notre série. C'est un récit au cœur du Social Democratic Front, du Front du Non, qui donne aussi un aperçu des réseaux occidentaux de « soutien » aux jeunes leaders militants africains.
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PHOTOGRAPHIE
(Photos : DOUALA, par Joseph Désiré Som 1)
- Douala le 13 février, conférence de presse de Ni John Fru Ndi (SDF), Joseph Désiré Som 1 lui tend un t-shirt "Non" contre la modification de la Constitution par Paul Biya.
- Après la conférence de presse et le départ de Fru Ndi, les opposants au projet de modification de la Constitution partent en manifestation.
- Manifestation SDF Littoral et opposants au projet de Paul Biya le 13 février 2008.