Épisode n°107 | Stéphane Martelly, à partir d’Haïti et de la poésie
Stéphane Martelly se tient aux carrefours : enracinée de la manière la plus exaltante qui soit dans la richesse de l’archive littéraire haïtienne, et dessinant des horizons enthousiasmants, tant au sein de sa fascinante œuvre littéraire que chez les Martiales, la collection qu’elle porte aux éditions du remue-ménage. L’écouter Stéphane parler donne envie de lire, écrire, comprendre, rire, interroger, troubler et révolutionner le monde. Écouter →

À 38 ans, en 1947, un homme profondément blessé, Chester Himes, crache « La Croisade de Lee Gordon » à la face de l’Amérique. Il reçoit un accueil unanimement réprobateur. Mais Himes a trop morflé pour avoir la pudeur ou le romantisme des combats héroïques. Et il avait suffisamment d’audace désespérée pour tremper les mains dans la complexité des êtres, aussi boueuse fut-elle. Peu lui importait qu’on ne soit pas « entre nous », peu lui importait de plaire, d’être stratégique ou de coller à un programme idéologique. Il écrivait avec l’énergie convulsée des nausées violentes, la rage impuissante des dernières cartouches et l’humour des naufrages.
Le deuxième roman de Touhfat Mouhtare, Le Feu du milieu, est une œuvre exaltante où s’entremêlent conte et réalisme. Les deux protagonistes du livre, toutes deux issues de classes sociales très différentes, sont confrontées à diverses époques de leurs vies, aux réalités de leurs conditions sociales respectives. Au fil de pérégrinations marquées par le merveilleux se tisse la trame d’une relation complexe et au moyen de la fiction, l’auteure énonce des questionnements enthousiasmants sur le genre, la spiritualité, l’amour et les héritages historiques comoriens.
En 2021, Louis Witter, photojournaliste, s’est installé pour 18 mois sur la côte d’Opale, dans cette zone où des exilé·e·s avec des rêves d’Angleterre viennent se heurter à sa frontière externalisée sur le territoire français, symbolisée par la ville-prison de Calais. Il a documenté le harcèlement policier quotidien des exilé·e·s mis en place au nom de la stratégie dite du « zéro point de fixation ». Son livre « La battue » raconte en lignes précises et claires le mélange d’absurdité et de cruauté qui gouverne la vie des exilé·e·s sur ce bout de frontière avec l’Angleterre où viennent s’échouer des âmes exténuées en quête d’une nouvelle vie.
born bad (2003) est la troisième pièce écrite par la dramaturge, metteuse en scène et réalisatrice afro-caribéenne et britannique, debbie tucker green. La forme minimaliste, dépouillée décuple toute la brutalité du sujet au cœur de la pièce : celui de l’inceste. Une pièce courte, brûlante, à mort. Où la vulgarité vengeresse, l’agressivité, le répété frénétique mènent la machine à incester à la rupture. Où l’incestée, DAWTA exige de l’entreprise familiale un bilan, aussi bref que violent : la reconnaissance de ce qui a été. 

